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Tu viens de débarquer dans un monde de la Magie subissant la dictature cruelle et sanglante de Lord Voldemort !
Un Monde où tout n'est que pouvoir, les faibles ne survivent pas ou suivent péniblement les forts.

Poudnoir est un forum qui se veut le plus réaliste possible ainsi la violence des combats et l'atmosphère de cette dictature est retransmise le mieux possible.
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L'Odyssée ♦ SOLO

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    | Mangemort ;; Directeur de la Coopération Magique
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    Ferdinand L. Selwyn
    Date de naissance du joueur : 25/08/1994
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MessageSujet: L'Odyssée ♦ SOLO L'Odyssée ♦ SOLO EmptyJeu 13 Juil - 20:51

L'Odyssée ♦ I




L'ensemble des portraits était muré dans le silence. Il n'y avait plus que des regards, soudainement muets et immobiles. Des regards perçants, multiples, qui semblaient vouloir signifier tant d'histoires inabouties, de traits inachevés. Des dessins d'êtres qui, un jour, avaient accepté que l'on représente leur visage. Une multitude de peintre qui avaient réussi à capter, par leurs mains, par la peinture, tant d'expressions différentes.
Cela avait sans doute dû être particulièrement difficile de leur demander de ne penser à rien, de ne voir que le peintre prenant le temps de figer leur empreinte corporelle. Les sentiments les plus purs, les plus irréfléchis avaient alors pris le dessus. Leurs propriétaires n'avaient absolument rien contrôlé et avaient laissé leurs psychismes choisir à leur place. Certains d'entre eux avaient dû en vouloir à ces émotions d'être venues, d'avoir pris le dessus pour l'éternité. Il ne restait désormais plus que la force de leur regard, à jamais fixé dans le temps par l'art.
Les corps avaient fini par disparaître. Après avoir été l'objet du peintre, ils avaient continué leur tragique, absurde et lente course vers la mort certaine. Jour après jour, ils avaient décrépi, comme rassurés d'avoir donné ce qu'ils avaient pu à l'éternité. Les âmes avaient fini par disparaître, comme apaisées d'avoir accompli un devoir artistique. On avait fini par les oublier, maintenant enterrés et dévorés par les vers de terre. Ils n'avaient pu échapper à leur condition, tandis que leurs regards semblaient rappeler à ceux qui les observaient l'inéluctable sillage tracé par le destin humain. Ils étaient comme des vigies veillant à leurs proies humaines ; antiques Parques s'amusant avant la bonne fortune des êtres qui mouvaient leurs corps dans ce salon si étrange.
Les yeux ne lâchaient aucun étranger et leur rappelait que la vie n'était, au final, qu'un éternel jeu de regards. C'était à celui qui saurait le mieux se regarder, à celui qui serait capable de prendre conscience de la multitude des univers possibles.
Tout n'était qu'hypocrisie.

Pour avoir la chance de se voir rappeler une fatale condition humaine, il fallait poser ses pieds dans le salon officiel de l'Hôtel Selwyn III, situé dans la banlieue de Londres.
Ferdinand Selwyn, le propriétaire, avait choisi cette demeure Selwyn pour lieu de vie quotidien. De nombreux châteaux étaient à sa disposition, la fortune immobilière des Selwyn étant sensiblement importante. Mais le Directeur du Département de la Coopération Magique Internationale avait choisi cet hôtel particulier, spacieux mais à l'image du propriétaire des lieux. Un petit manoir confortable comportant de nombreuses pièces mais guère de quoi provoquer le vertige. Il s'y était construit un véritable cocon, une dépendance de l'immense machinerie Selwyn. L'hôtel Selwyn III était devenu le repère des très nombreuses soirées mondaines, une sorte d'antichambre au pouvoir absolu. Nombreux étaient ceux qui avaient un jour eu le privilège d'être invités à l'une des soirées organisées par le célèbre diplomate Puriste. Mais l'hôtel semblait autant être un rempart qu'une porte ouverte vers la notoriété. Beaucoup, également, s'étaient cassés les dents en se pensant invincibles dans une telle demeure.
La bâtisse et son propriétaire semblaient être des passeurs, un point important du Purisme. C'était le lieu des rites sociaux, des mondanités, des dîners où l'argent, l'alcool et le luxes coulaient dans une rivière d'or. Les fêtes y étaient nombreuses, la possibilité de rencontrer de grands dirigeants tout autant. Avec les années, le manoir de Ferdinand était devenu une sorte d'exutoire des plus grandes passions, un lieu par lequel il fallait passer pour escompter grimper dans la société.
Passé ce salon officiel, peu parvenaient cependant à aller plus loin. Les petits salons de l'hôtel, le bureau de Selwyn, sa célèbre bibliothèque, les différents lieux de discussion privée, beaucoup de cette intimité était alors inconnu. Il ne s'agissait, au final, que d'une scène de théâtre où quelques marionnettes aimaient, le temps d'un soir, se faire voir. Et pour trouver le propriétaire des lieux, il fallait oser affronter la multitude des regards et trouver le bon tableau.

Ce soir-là, une douce lumière émanait des différents chandeliers du salon officiel. Les importantes fenêtres donnaient sur la banlieue endormie de Londres, tandis qu'un silence apaisant régnait sur la demeure.
Quelques heures auparavant, le Directeur Selwyn avait reçu une délégation italienne, reçue en grande pompe par le Ministère le matin même afin de ratifier les différents accords de jeu avec le Département des Jeux et Sports Magiques. Selwyn avait orchestré cette rencontre et s'était assuré qu'elle intervienne à un moment où Malfoy ne serait pas disponible pour recevoir. Une fois de plus, ses savantes orchestrations avaient eu gain de cause.
Mais le temps avait fini par passer et tous étaient partis. Les elfes avaient nettoyé le salon et retiré l'ensemble des meubles inutiles. On ne retrouvait qu'un grand canapé placé en plein milieu, sur un tapis aux motifs perçants et sur lequel on avait installé un simple guéridon. Dans un coin de la pièce, un meuble cachait un gramophone éteint. L'immensité de la pièce contrastait avec le peu de meubles qu'on y avait installé. C'était comme si un simple et petit homme pouvait se retrouver ici, entouré de la grandeur des choses et de la complexité des regards.
A y regarder de loin, la pièce semblait s'endormir petit à petit, comme l'ensemble de l'hôtel particulier. Les planches de bois du sol se reposaient, après avoir supporté pendant des heures le poids de l'hypocrisie sociale. Les regards, eux, ne fixaient plus que du vide tandis que, petit à petit, les lumières du dehors s'éteignaient. L'existence de tout un monde prenait fin, pour quelques heures, avant la naissance d'un jour nouveau qui verrait, une fois de plus, naître les plus folles ambitions et les désirs les plus fous. Les hommes, après s'être livrés à eux-même par le sommeil, le rêve ou le sexe, redeviendraient des marionnettes sociales manipulées par leur propre désir de donner un sens à leur vie.

Mais à y regarder de plus près, on pouvait voir qu'un des tableaux n'était pas comme les autres.
Il s'agissait tout d'abord du seul portrait qui ne regardait personne. Un regard de biais. Un jeune-homme, pâle, torse nu, un pantalon à la mode vénitienne porté avec négligence. Un garçon des rues, peut-être. C'est vrai qu'on ne devinait pas une forte carrure, mais plutôt un frêle corps encore jeune mais terriblement appauvri. On avait alors l'impression que le bonhomme ne cherchait qu'à fuir le regard des autres. Si semblable de loin, et si différent si on prenait le temps de s'intéresser à lui. Un esseulé dans la masse.
Ce n'était, en revanche, pas la seule anomalie que l'on remarquait dans les détails de ce portrait. Il paraissait assez évident qu'il n'était pas fixé de la même manière. Plus encore, et surtout ce soir-là, une entaille dans le mur apparaissait. Il fallait alors moins de quelques secondes pour comprendre que le portrait menait à un couloir, bien plus différent que le reste de la pièce que l'on venait de quitter.
L'air y était en effet bien plus froid et les murs bien plus glaciaux. Aucune décoration ne semblait avoir été ajoutée et le couloir apparaissait dans son plus simple appareil. Il avait été creusé à même la pierre. Une pierre qui constituait à la fois le sol, les murs et le plafond. Petit à petit, on en oubliait le luxe et le confort de l'hôtel, tant le chemin était long et sinueux. Plusieurs marches parcouraient la route et il valait mieux être un visiteur informé et habitué pour ne pas prendre le risque de se blesser.
Enfin, au bout de plusieurs minutes, on arrivait à une salle circulaire dont les murs et le plafond étaient entièrement recouverts de miroirs. Une simple bougie constamment allumée et dégageant une lumière blanche lévitait au centre de la pièce. A n'en pas douter, c'était ici le bout du couloir et il était impossible d'aller plus loin.
Ce soir-là, l'un des miroirs présentait les mêmes caractéristiques que le tableau. Légèrement entrebâillé, il permettait d'entrer dans une autre pièce tout aussi froide.  

« Il y a fort à craindre que le MACUSA tente d'empêcher certaines lois. Ils deviennent là-bas très sensibles aux anti-conservateurs. Certains craignent un isolement.
C'est tout à fait certain. Le rapport de Y. nous annonçait que le Président maintenait cependant bien le cap. Grâce à la nomination de l'un de ses opposants à un poste d'ambassadeur.
— C'est vrai. Mais Delwinson a de nombreux hommes à son service et sa fortune empêche le Président de trop l'éloigner.
Bien, bien. Dans ce cas, il est important que le Purisme politique lui vienne en aide. Il me faudrait un rendez-vous avec Malfoy fils le plus tôt possible. A la différence de son père, ce garçon est compétent et pourrait nous être utile.
— Le Président sera quoi qu'il en soit présent demain.
Certes. Mais de Tokyo, nous pourrons guère faire une quelconque action qui lui soit favorable. Envoyez un papier à Neeson. Je dois rencontre le Président très tôt dans la matinée, afin que nous organisions une visite à Washington. J'ignore encore s'il faudra se servir de Malfoy.
— Bien, Monsieur.
»

Il y eut quelques secondes pendant lesquelles la nuit et le calme alourdirent l'air. C'était comme si tout était devenu pesant.

« Faites en sorte qu'F. élime rapidement les deux familles.
— Le père a juré qu'ils ne diraient rien.
On jure ce que l'on veut quand on voit sa fin s'approcher en trottinant.
»

Les voix résonnaient dans la pièce aux miroirs et semblaient se percuter contre les reflets.
Celui légèrement ouvert pivota et laissa paraître un homme assez grand, le dos voûté, le regard fuyant. Le peu de lumière ne permit que d'éclairer un barbe de quelques jours grisonnante et quelques cicatrices. L'homme disparut aussi rapidement qu'il était arrivé.

L'espace laissé ouvert permettait alors d'entrer.
Une fois de plus, tout contrastait avec le reste du salon officiel. Il paraissait peu imaginable qu'une pièce aussi secrète et aussi froide pût se trouvait à quelques mètres d'un salon où la richesse, la culture et le bon goût avaient élu comme domicile.
Ici, la lumière s'était montrée plus généreuse, puisque quelques fenêtres haut placées laissaient entrer la lumière de la lune. Par des traits stridents et blancs, la lune découpait des bandes de froideur dans une pièce aux murs qui semblaient être faits pour supporter plusieurs étages. C'était à croire que toute une aile du manoir avait été réservée pour cette seule immense salle aux murs nus et dénués de toute chaleur.
Une fois encore, un mobilier des plus simples avait été choisi. Un piètre table de bois, taillée rapidement et sans grand artifice, trônait au milieu de la pièce. Un chandelier de bois accueillait une bougie qui venait apporter un peu plus de lumière.
Dans cette salle, le calme devenait dérangeait. Il n'y avait plus aucune sécurité, plus aucun repère. C'était à croire qu'en traversant le tableau du salon officiel, on avait accepté de changer de monde et de remettre en cause l'ensemble de clefs d'interprétation du monde. Perdu, n'importe quel être humain aurait été pris de panique face à une telle froideur pétrie d'incertitude.

Seul le bruit de la plume grattant le papier rappelait que des êtres vivants vivaient bien ici.
Il suffisait alors de baisser la tête. D'oublier les hauts murs de pierre et les perçantes fenêtres de la lune. Il suffisait un instant d'oublier que l'on se trouvait dans un lieu que même les fantômes avaient décidé de fuir.

En baissant la tête, vous tombez nez à nez avec un petit homme à la barbe et aux cheveux blancs et roux, taillés avec précision et maniérisme. Au-delà ces joues bien rondes, de cette senteur de lavande, au-delà de cette magnifique robe de chambre aux motifs orientaux cousus dans des fils d'or, au-delà de ce verre de vin rouge en cristal posé sur la table de bois comme une plume viendrait embellir un charnier, vous vous retrouviez face au regard terriblement froid, inhumain, désincarné, secret et distant de Ferdinand Selwyn.
Il ne vous reste alors plus qu'à comprendre que petit à petit, vous vous êtes fait entraîner dans les tentacules d'une pieuvre.
Il ne vous reste alors qu'à être dévoré.
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    Ferdinand L. Selwyn
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MessageSujet: Re: L'Odyssée ♦ SOLO L'Odyssée ♦ SOLO EmptySam 29 Juil - 1:26

L'Odyssée ♦ II



Une forme grisâtre oscille dans l'eau ; c'est gros comme le bras et long d'une demi-aune environ ; c'est un chiffon ; cette forme ressemble à un parapluie fermé qui n'aurait pas de manche. Cette loque avance vers vous peu à peu. Soudain, elle s'ouvre, huit rayons s'écartent brusquement autour d'une face qui a deux yeux ; ces rayons vivent ; il y a du flamboiement dans leur ondoiement ; c'est une sorte de roue ; déployée, elle a quatre ou cinq pieds de diamètre. Épanouissement effroyable. Cela se jette sur vous.
L'hydre  harponne l'homme.
Cette bête s'applique sur sa proie, la recouvre, et la noue de ses longues bandes. En dessous elle est jaunâtre, en dessus elle est terreuse ; rien ne saurait rendre cette inexplicable nuance poussière ; on dirait une bête faite de cendre qui habite l'eau. Elle est arachnéide par la forme et caméléon par la coloration. Irritée, elle devient violette. Chose épouvantable, c'est mou.



« Mon Secrétaire d'Etat vous a donné toutes les assurances nécessaires. Qu'attendez-vous de plus?
Oh, très cher, ne prenez pas de ton péremptoire en ma compagnie. Si j'ai souhaité cet entretien improvisé à la sauvage, c'est bien pour vous assurer du plein soutien de l'Angleterre. La voix de Ferdinand se fit plus tamisée. Je connais la situation de votre gouvernement. Ce traité vous renforcera. Mais il est certain qu'on cherchera à vous déstabiliser par tous les moyens juste avant. C'est de bonne guerre, après tout !
— Ils ont eu accès à vos textes, et...
C'est bien pour cette raison que je vous en ai envoyé un exemplaire factice ! Je vous ai rapporté le projet de loi avec moi, bien qu'il ne soit qu'une première étape à un long débat parlementaire. Vous y jetterez un rapide coup d'oeil puis nous ferons disparaître les papiers. Il était évident qu'ils chercheraient à prendre possession du texte, ne serait-ce que pour contrer vos projets. Mais il y avait derrière cette basse manoeuvre l'envie de contrôler les affaires de l'Angleterre. Et je ne prononcerais point de calembredaine en concédant que nos affaires sont très bien tenues !
— Je n'en ai jamais douté. Quand les débats commenceront-ils?
Une fois l'élection du Grand Electeur actée. Après les bas tumultes des campagnes électorales, quelques uns aiment se rappeler qu'ils valent mieux et tournent leurs hypocrites regards vers le monde et ses enjeux. Ils est souvent de bon ton d'adopter de grandes mesures internationales, afin que la nation soit forte après la boue amassée pendant l'élection... Les négociations ne commenceront que dans six mois. J'ai d'ailleurs fortement appuyé auprès de la Confédération et ses ânes de l'administration centrale pour qu'on allions plus vite. Imaginez un peu le tableau, mon pauvre ami ! Nous en avions pour plus d'une année ! Peut-être deux. Quelle saugrenuité ! »

Ce qu'il pouvait être idiot, bon sang de bois !
Il n'y avait jamais rien eu de pire que les dirigeants idiots qui prenaient des airs de personnes intelligentes. Elles affluaient dans les salons diplomatiques, tout auréolées de leur gloire nouvelle mais terriblement éphémère, se pavanant avec un panache qui ne laissait personne de marbre. C'est qu'on avait l'habitude, de ces pantins de la politique qui changeaient de nom tous les cinq ans. Ils faisaient tout pour être élus, redoublaient d'efforts pour passer les portes de mondes qui leur avaient toujours craché dessus. Puis ils étaient là, fiers et heureux, mais déjà en train de disparaître. Par leur conquête, ils laissaient aussi entendre que ce serait tout. Qu'un jour, ils partiraient.
Les autres, ceux de l'ombre, directeurs de cabinets, ambassadeurs, conseillers, ils étaient constamment dans la course, jouant des coudes pour prendre une place toujours plus intéressante en fonction des moments. Seule la date importait, au final. Ils évoluaient ici comme une vieille cour de récréation habituée à voir passer les oiseaux moqueurs. Ils connaissaient des règles qu'eux-mêmes édictaient et voyaient sans cesse passer quelques roitelets qui, un jour, avaient décrété qu'ils changeraient toutes les lois de ce monde d'influence, puis qui disparaissaient pour laisser leur place à un autre empereur de quartier prêt à tout pour sa réélection. Pendant que certains sortaient la tête de l'eau avant de se faire manger par des poissons plus impressionnants qu'eux, les tortues et autres animaux marins faits de discrétion avançaient calmement, sereinement, regardant le cours du monde changer sans cesse sans jamais bouger le moindre poil.
Qu'importaient leurs postes, au final.
C'étaient eux, les véritables capitaines des navires.
Directeurs de Département le lundi, conseillers diplomatiques le mercredi, présidents de conseils d'administration le vendredi, qu'importait, au final. Ils étaient là, toujours à manipuler les lois de la politique comme des jongleurs répétant sans cesse le même numéro dans des spectacles qui n'ont de cesse de changer.
C'était ça, leur rôle. Faire durer une comédie où quelques uns venaient se brûler les ailes, tandis que seuls ils demeuraient.

Selwyn avait les jambes croisées sur une rambarde rembourrée de cuir installée autour de la cheminée. La main fermement fermée sur un verre de vin rouge, il dégustait le breuvage tandis que le Président du MACUSA fulminait en silence dans un des fauteuils du salon de l'ambassade.
A son allure, on avait clairement l'impression de retrouver une vieille aristocrate dans un boudoir anglais de la fin du XVIIIième siècle. Le dos droit, les jambes croisées avec délicatesse, une main posée nonchalamment, les lèvres pincées, il semblait ne prendre ombrage d'aucun risque que les discussions diplomatiques laissaient entendre.
Jamais il ne semblait atteint par une quelconque vague, qu'elle vînt de son camp ou du camp adversaire. Gardant le sourire doucereux et mine affable, chaque événement était pris avec légèreté, déstabilisant la plupart de ceux qui cherchaient à l'attaquer tant il ne réagissait par quelques politesses mondaines. Inoffensif à première vue, Selwyn attrapait l'autre et l'amenait là où bon lui semblait, pour mieux l'endormir et lui planter ses crocs qui, eux, avaient un venin bien moins mielleux que le thé qu'il sirotait tous les matins.

«[color=rosybrown] A ce propos, figurez-vous que j'ai une anecdote à vous raconter. Elle ne date pas d'hier. Le gras politicien diplomate prit une gorgée de vin qu'il avala avec élégance. Il déposa son verre vide sur un guéridon et joint ses mains sur ses potelées cuisses avant de reprendre.[color=rosybrown]Elle remonte à bien loin, même. Dans l'Antiquité Romaine, chaque général victorieux rentrait de ses campagnes dans une cérémonie particulière que l'on appelait le triomphe. Défilaient alors les militaires, celles et ceux qui avaient participé à ce succès épique, mais aussi le butin. Un butin qui avait, avouons-le, bien souvent l'objectif de donner envie et de signifier la superbe de celui qui, installé sur son chat, défilait devant le peuple. On raconte qu'avant l'entrée dans la Cité, un général arborait avec fierté tous ses trophées. Un vieil esclave, allongé au sol, vit le cortège passer et lança un os. Ce dernier tomba aux pieds du général. De cette manière, il lui rappelait qu'il n'était qu'un mortel. Dès lors, une coutume s'est mise en place à Rome. Un esclave s'est toujours tenu derrière son général, un crâne dans la main. On raconte que le premier chuchotait au second: Respice poste! Hominem te esse memento, memento mori. Regarde derrière toi ! Souviens-toi que tu n'es qu'un homme, souviens-toi que tu es mortel ! »

Selwyn laissa un temps.
Le Président n'avait eu de cesse d'observer le Directeur du Département de la Coopération Magique conter cette anecdote.
S'il avait d'abord ressenti de l'amusement, il se plongea de plus en plus dans l'histoire contée par Ferdinand, tant est si bien qu'il s'imagina parfaitement cette scène.
Le temps sembla se suspendre pendant un temps, laissé entre les mains d'un feu de cheminée qui ne faisait que crépiter. Les flammes se reflétaient sur les parois du verre bu par le diplomate anglais.

Le petit homme se leva.
Impeccable dans son costume victorien tout en velours, incroyablement élégant et coquet dans sa cravate de soie, il sembla soudainement avoir changé d'humeur.
Et c'est un regard vide, inexpressif, profondément froid que vit le Président américain.
Selwyn fit un petit signe de tête.

« Vous vous demandez légitimement où je veux en venir, n'est-il pas? Il y eut un bruit de pas, de l'autre côté de la porte. On toqua deux coups. Notre existence ne tient qu'à peu de choses et nous sommes sans cesse obligés de redoubler d'imagination pour survivre. Un des gardes de Selwyn ouvrit la porte. Pour cela, il est nécessaire que nous nous rappelions sans cesse la fragilité de notre tragique condition sur cette terre. »

Le Président, bien que surpris des propos de Selwyn, tourna la tête vers l'entrée du salon de l'ambassade.
Il vit un groupe de personnes arrivées.
Elles détonnaient avec l'ambiance et les décors du lieu. Trois hommes, habillés comme s'ils sortaient d'un champ de bataille ou d'une aventure de plusieurs jours et un autre dans un piteux état accompagnaient une jeune femme qui ne faisait pas la fière.
Vêtue de guenilles, cette dernière présentait de nombreuses blessures, notamment sur le visage. Visiblement endormie, sinon même inconsciente, ses pieds traînaient sur le sol, le corps tiré par un sortilège invoqué par l'un des trois hommes.
L'homme, lui, était dans un état plus convenable. On reconnaissait encore, chez lui, des habits de gala, bien qu'ils laissaient voir quelques entailles sur un corps encore bien jeune.

« Eh bien, eh bien ! Selwyn s'avança en sautillant, comme un enfant-démon au corps amusé mais au regard froid. Nous voilà en bien charmante compagnie, mes enfants ! Il s'approcha des deux prisonniers. Bien qu'on puisse dire que vous n'êtes guère apprêté pour une rencontre telle que celle que vous avez la chance de vivre aujourd'hui. Nous mettrons cela sur le compte de la jeunesse. Il s'arrêta, contempla les deux personnes et eut l'air affligé. Il tourna ensuite la tête vers le Président. Alors, très cher ! Vous vous êtes comporté comme un galopin ! Vous nous aviez savamment caché la disparition de ces deux individus. Le Président se leva, perdu et hébété. Vous ne nous aviez pas dit que la tendre fille de Monsieur Delwinson avait disparu.
La jeune femme sembla reconnaître son nom et tenta d'articuler quelque chose.
Le Président balbutia quelques mots. Est-ce vous? C'est vous, qui avez fait cela?
Aucune importance, cher ami, aucune. Ils sont entre nos mains, maintenant. Et c'est là tout le sel de cette fabuleuse histoire ! Il s'éloigna du groupe, contemplant ses petits souliers cirés qui caressaient les planches polies du parquet. J'ai eu la chance de faire la connaissance de Mademoiselle Clarice Delwinson et de son jeune fiancé Andrew. Magnifique Andrew, plein de muscles et de courage !
— Qu'avez-vous fait?
J'ai fait ce qu'il y avait à faire et ce que vous n'avez pas eu le courage de faire. Selwyn retourna s'installer au bord de la cheminée. La mort, cher ami, elle est là qui nous attend et qui nous guette. Vieille érinye qui ne nous lâche pas d'une semelle. La loi est simple. Vous tuez, ou vous êtes tué. C'est à vous choisir, à chaque seconde. »

D'un mouvement vif, il sortit sa baguette et brisa l'air avec délicatesse.
Il y eut un bruit de souffle coupé.
Le Président tourna instinctivement la tête vers le groupe. Il vit Andrew s'écrouler de tout son poids, se tenant la gorge avec panique.
Du sang sortit de ses mains sales et vint se répandre sur le parquet, s’immisçant dans les arêtes de bois. Il leva les yeux vers le Président et tenta de dire quelque chose. La peur se lisait dans son regard bleu.

« Vous voilà désormais en position de force, grâce au Ministère de la Magie et à votre humble serviteur ! Dès demain, vos services informeront votre rival politique qu'ils ont retrouvé sa fille. Il vous sera redevable de quelque chose. Vous n'aurez hélas pu sauver son pauvre fiancé, honni par le père, d'après ce que mes petits oiseaux m'ont murmuré. La violence de sa mort ne fera qu'augmenter la gratitude de Delwinson. »

Le Président hésita.
Son regard ne fit que tourner, allant de Selwyn au cadavre encore chaud d'Andrew en passant par Clarice encore complètement inconsciente.
Puis il se leva, s'avança vers le cadavre, évitant avec soin le sang qui continuait à couler, comme pour se rendre compte de sa victoire.
Un tel calme, un tel luxe et une telle violence semblaient se marier avec horreur et enchantement. Il tourna à nouveau la tête vers le Directeur du Département de la Coopération Magique Internationale.

Jamais encore il n'avait vu un tel regard.
Le regard du monstre, enfant innocent à la diabolique âme. Il eut presque pitié pour cette créature assise là, les rondelets bras accrochés à ce gras corps. Il prit conscience de la profondeur de l'horreur chez cet être aux allures d'extravagant qui ne cherchait qu'à se faire mousser dans les salons diplomatiques mondains. Il vit, au-delà de la monstruosité, la candeur même d'un être sans limites qui ne se rendait même plus compte de la portée de ses actes, dévoré par sa haine et son envie de destruction.
Plus rien ne serait véritablement comme avant.
Les ténèbres avaient mis leur pion dans l'échiquier international. Il n'était désormais plus possible de reculer.
C'était trop tard.
Elles avaient réussi l'exploit de les rendre tous prisonniers de sa folie.

« N'ayez crainte ! Nous nous débarrasserons du corps qui sera trouvé d'ici deux mois et seize jours, d'après ce que nous avons décidé. Quant à elle, cette pauvre enfant sera évidemment oubliettée et elle ne pourra raconter ce qu'elle a vécu. Selwyn alluma une fine et élégante cigarette. Quelque chose se prépare, mon ami. Quelque chose de grand, quelque chose que personne n'a vu auparavant. Cette grande fête, cette célébration de la Magie, ne se fera pas sans dommages. Il sera l'heure pour chacun d'avancer ou de mourir. Le spectacle n'attend pas, après tout ! Le Directeur de la Coopération Magique Internationale tira une importante bouffée de tabac sur sa cigarette. Chez moi, à Londres, j'ai gardé une pièce pour me souvenir à chaque minute de ce que nous venons de voir. Les murs contiennent des os en tout genre. En voyant cette condition humaine chaque jour, je n'oublie pas que c'est à moi de tuer pour éviter d'être tué. La guerre a déjà commencé, cher ami. Elle est là, sous vos yeux. Ouvrez-les et regardez-la droit dans les yeux. »

Et tout ce que vit le Président, ce fut un petit aristocrate rond, assis élégamment sur un rebord de cheminée, tout pimpant et la voix mielleuse, engoncé dans sa monstruosité.
Il se rassit.
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MessageSujet: Re: L'Odyssée ♦ SOLO L'Odyssée ♦ SOLO EmptyDim 29 Avr - 15:00

L'Odyssée ♦ III



Ca a peut-être commencé comme ça.

Harlem, la nuit.
Les esprits s'échauffaient souvent à décrire les banlieues new-yorkaises, symboles de la dépravation moldue que d'innombrables chaînes de télévision s'étaient plu à dépeindre. On y avait parqué des familles entières, comme partout dans le monde, partagés entre la volonté humaniste de montrer l'accueil libre et le diktat conservateur qui exigeait des puissances un peu de modestie dans l'hospitalité réservée à des personnes qui, après tout, n'étaient pas du pays. Conscients d'un tel cas, on s'était inventé des problèmes majeurs pour des faits de liberté et d'accueil que bien des civilisations avaient pu envisager avec bien plus de sérénité et de naturel.
Or, il y avait quelque chose de sensiblement surprenant à découvrir de tels lieux la nuit. Les lumières variées des appartements étaient comme des camaïeux de contraste, exigeant qu'on prenne ce que l'on voyait pour une réalité bien installée ; des familles aux nuances aussi complexes que complémentaires vivaient ici. A s'y regarder de près, elles constataient leurs différences, leurs cultures opposées, sinon radicales. De plus loin, c'était un tableau lumineux intéressant qui ne laissait finalement que peu de place à la lumières des rues.
Des rues tout aussi contrastantes, où la vie se reflétait dans l'humidité de quelques caves ou bancs mouillés par la pluie. Ici bas, les plus jeunes et téméraires ne se reconnaissaient pas, ou plus, dans ces familles aux lumières bariolées. Ils s'y étaient exclus, préférant le confort du froid du dehors que d'appartenir trop nettement à un groupe éloigné par la société. Pétris du besoin de s'en éloigner, ils n'en restaient pas moins fidèles, quand même forcés à rester dans un lieu qui les isolait du reste du monde, ou du reste de ce qu'ils pensaient être le monde. Vaste fumisterie, qu'ils disaient.

Le bruit des talonnettes de Ferdinand Selwyn résonnait et se heurtait aux murs sales de Harlem. Minuscule boule de graisse parfumée à la lavande, il avançait tel un roi dans son palais de métal, cigarette dans une main, canne à pommeau dans l'autre. Sa démarche alliait une savoureuse posture de dandy, celle d'un enfant pressé de découvrir un nouveau monde, et l'air inquiet de ceux qui, quand même, se trouvent là où ils ne maîtrisent pas tous les codes ; ce qui, pour Selwyn, équivalait à ne rien maîtriser.
Il avançait, seul.
Voir dans un tel lieu un homme habillé à la mode victorienne, aux cheveux blancs et roux gominés qui reflétaient la lumière des réverbères, tenait du prodige ou de la mystification. Organisait-on une fête costumée? Un enterrement de vie de jeune garçon? Quelque chose n'allait pas de soi, et les quelques jeunes hommes arnachés de baksets qui le voyaient passer n'osaient pas intervenir, comme stupéfaits de voir arriver ce que personne n'avait pu un jour concevoir. Ferdinand représentait l'intervention extérieure, visiblement sereine, l'entrée de l'autre monde dans le leur. Qu'il fût Magicien les dépassait, il était tout ce qu'il y avait de plus surnaturel, par sa présence même. Ses pouvoirs ne tenaient pas d'une baguette magique, mais de cette capacité soudaine à briser les codes implicites, à s'aventurer calmement et jovialement dans un territoire que beaucoup de sots esprits considéraient depuis des décennies comme ennemi.
Rien que pour cela, ils lui étaient reconnaissants, et jamais il ne leur vint à l'esprit d'aller accoster cet homme, cette créature de l'ailleurs. Car ces représentations de banlieusards s'en prenant à n'importe qui dans leur territoire, ne tenaient bien que de leur nomme. Des représentations. On avait calqué, confortablement engouffrés dans un confort élitiste, une vision des banlieues sur la tête des personnes qui y vivaient, tant est si bien que les pires peurs de ceux qui n'y vivaient pas s'étaient incarnées dans la fiction et avaient fini par déborder sur la réalité.

C'était une nécessité.
Ferdinand n'avait pu s'empêcher de suivre les indications de ses petits oiseaux. Un bar sorcier à opium, en plein coeur de l'interdit, il s'y était rué. Toujours surpris de constater à quel point les classes dominantes aimaient à se cacher dans la misère sociale, il allait de soi pour lui que personne ne l'y trouverait. Il portait la parole de Purisme, celle d'un système politique de plus en plus important et vu de toutes les têtes dirigeantes qui adaptaient leurs idéologies aux événements qui pouvaient les conforter dans leurs pouvoirs. A l'intérieur du pays, Chapman était une chape de fer sur des affaires et des lois internes qui assuraient une profonde métamorphoses de moeurs. Profonde, mais durable. Quant à Ferdinand, il entraînait son carnet d'adresse et de mondanités à travers le monde. Toujours vu dans les dîners officiels internationaux, toujours perçu dans les boudoirs influents, il répandait la parole Puriste avait l'air d'un marchand d'art agréable à écouter et absolument inoffensif. Il avait réussi l'exploit à enfermer dans du velours de luxe le fer de Rosier, alliage utile à Lucius Malefoy qui laissait tout faire à ses deux Directeurs de Département, du moment que cela lui apportait une sécurité au Ministère anglais.
Mais arpenter le monde avait cet affable sourire coûtait de plus en plus d'efforts à Selwyn. Le masque de porcelaine efféminée et excentrique lui demandait sans cesse des efforts que son âme ne consentait à faire qu'à la condition d'obtenir une compensation. L'alcool ne suffisant plus, le tabac étant devenu un rituel, il s'était progressivement tourné vers l'opium, nouvelle compagne d'aventure dans sa quête de déshumanisation.

Allongé dans un canapé rougi par le velours, il repensait à tout ce parcours mené dans le quartier humide et désert.
L'addiction s'était délicatement installée dans ses veines, comme pour soulager le trop imposant poids de la magie qui circulait dans son sang. Sa main habituellement délicatement potelée dépassait sur un des accoudoirs.
Il était là, dénudé d'expressions, perdu dans ce qui s'avérait être un gouffre pour sa propre personne.
Désincarnée.
Sa main était désincarnée. Elle avait perdu de sa couleur vitale, pendant là comme un pied de cochon que l'on a jeté dans un bac à l'abattoir. Rien ne semblait l'attendre. Cette main habile était dépossédée de tout son pouvoir.
Désincarné.
Ferdinand Selwyn était un être désincarné. Sans sentiments apparents, il s'éloignait de plus en plus de ce monde qu'il n'avait jamais compris. Sa quête n'était qu'une armure qu'il revêtait tous les matins, juste après les quelques minutes de doute et de peur qui l'assaillaient au réveil, pendant cette fraction de seconde où on n'est pas encore en vie et que les yeux sont encore gonflés du sommeil serein des grands inquiets. Il s'était amouraché du Purisme comme un désincarné osseux s'accrochant à une pauvre branche fragile. C'était pour lui l'occasion d'exister, de sentir qu'il avait un poids dans une société dont il maîtrisait parfaitement les codes. Un moyen de se rassurer, de se donner l'illusion qu'ici-bas, il avait un rôle, un semblait d'importance. Mentir, manipuler, jouer, c'est tout ce qu'il savait faire. Il le faisait avec une telle absence à lui-même qu'il avait fini par oublier, dans ces moments-là, qu'il existait vraiment. Qu'il était capable de ressentir. Ressentir.
Et le fossé entre lui et le monde était tellement grand que le vertige provoqué était toujours, et aussitôt, comblé par un substitut à la prise de conscience.

« Monsieur Selwyn? »

Selwyn.
Un nom parfois bien trop difficile à porter. Un nom qui certes lui avait ouvert les portes du monde, un monde qui cependant avait très vite espéré l'étouffer, l'agripper. Parce qu'il est toujours risqué d'entrer sans avoir besoin d'ouvrir la porte, il importe de toujours mieux s'y préparer et de tenir entre ses mains le maximum de règles données par ces institutions étrangement accueillantes. C'était peut-être ce que sa famille lui avait appris de plus fort, et de plus utile.
Toujours se méfier de ce qui nous somme dû.
Ferdinand s'était donc avancé dans l'antichambre de la société avec une aisance et une silence qui, comme à chaque fois, laissait chacun parler. Face à l'absence de paroles, face au silence assommant, il est à chacun d'imaginer et de placer sur la face de l'inconnu ce qu'il souhaite. Ferdinand était un Janus aux mille visages, où chacun projetait ce qu'il cherchait à voir. Impassible, lisse, ouvertement moulé dans les mondanités de la société, Selwyn s'était incrusté comme un poisson qui fait mine d'ignorer qu'il évolue dans un aquarium.

« Monsieur. »

L'était-il vraiment, un « Monsieur ? »
Toute sa vie n'avait été dirigée que par cet idéal, un idéal qui l'avait mené à aimer les hommes plus qu'il ne pouvait se construire selon ce modèle viril. Ferdinand aimait les hommes pour le charisme qu'ils dégageaient, par la force de leur carrure qui en imposait dans la société. Il se sentait protégé par leur souffle, entendu par leur virilité qui l'encadrait dans les moments les plus difficiles. Désireux et nécessiteux devant eux, c'était un père qu'il recherchait sans jamais parvenir à l'atteindre véritablement.
Par les idées, il était le parfait héritier. Par le corps et les désirs, il était un rebut, un paria, qu'on acceptait encore parce qu'il était influent.
Menacée de partout, sa citadelle...

« Monsieur le Directeur? »

Menacée de partout, sa citadelle s'avançait chaque jour vers une...

« Monsieur le Directeur ! »

Vers une chute qui lui apprendrait l'art de perdre.

Dans l’art de perdre il n’est pas dur de passer maître ;
tant de choses semblent si pleines d’envie
d’être perdues que leur perte n’est pas un désastre.

Perds chaque jour quelque chose. L’affolement de perdre
tes clés, accepte-le, et l’heure gâchée qui suit.
Dans l’art de perdre il n’est pas dur de passer maître.

Puis entraîne toi, va plus vite, il faut étendre
tes pertes : aux endroits, aux noms, au lieu où tu fis
le projet d’aller. Rien là qui soit un désastre.

J’ai perdu la montre de ma mère. La dernière
ou l’avant-dernière de trois maisons aimées : partie !
Dans l’art de perdre il n’est pas dur de passer maître.

J’ai perdu deux villes, de jolies villes. Et, plus vastes,
des royaumes que j’avais, deux rivières, tout un pays.
Ils me manquent, mais il n’y eut pas là de désastre.

Même en te perdant (la voix qui plaisante, un geste
que j’aime) je n’aurai pas menti. A l’évidence, oui,
dans l’art de perdre il n’est pas trop dur d’être maître
même si il y a là comme (écris-le !) comme un désastre.
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